Bilan professionnel: Faire le point pour rebondir

Inutile d’attendre l’impasse ou le licenciement pour réfléchir à sa trajectoire professionnelle. Il existe un outil pour s’assurer que les choses tournent rond et si pas, rectifier le tir: le bilan de compétences.

Négliger sa carrière

Il est toujours étonnant de voir un cadre se rendre annuellement chez son garagiste pour éviter que sa voiture ne tombe en panne, et négliger cette attitude préventive lorsqu’il est question de réussite et de qualité de sa vie professionnelle.

Même si dans les PME, des chefs d’entreprise gèrent leur personnel afin qu’ils s’y sentent bien notamment grâce à un management participatif (voir creerpme.be). La stabilité professionnelle a globalement disparu, les entreprises n’offrant plus la sécurité d’un plan de carrière prédéfini. Les turbulences sont fréquentes, et les trajectoires en ligne droite deviennent l’exception. Malgré cela, les exigences des salariés augmentent: ils veulent s’épanouir au boulot et rechignent à stagner dans une fonction inadéquate ou une ambiance pourrie. Pour éviter de juste réagir aux événements, un bilan aide à anticiper et à déterminer quelle direction professionnelle on veut prendre.

En outplacement, où l’on emploie ce genre d’outils pour aider des gens qui ont perdu leur emploi. Beaucoup disent leur regret de ne pas avoir bénéficié de ces techniques plus tôt. Plus on est jeune, plus les choix restent ouverts. Il est dès lors conseillé de procéder à un check-up de carrière tous les ans, et d’entreprendre un véritable bilan si trop de signaux d’alarme clignotent.

Un bilan professionnel, ça sert à quoi?

gestion-carriere A identifier plus clairement qui on est et ce qu’on veut. Cela permet, en principe, de mieux connaître ses points forts et ses points faibles, ses compétences clés, ses aspirations ou ses valeurs. Cela aussi aide à identifier les domaines dans lesquels on pourrait se développer; à réfléchir aux trajectoires que l’on aimerait entreprendre. On emploie aussi le terme «accompagnement de carrière» plutôt que celui de «bilan professionnel» ou «bilan de compétences».

C’est un processus qui peut aider tous ceux qui se posent de vraies questions en lien avec le boulot. Ceux qui ne sont pas sûrs d’avoir choisi d’avoir la bonne voie, qui ont l’impression de piétiner, qui estiment ne pas avoir atteint un bon équilibre entre leur travail et leur vie privée…

Conséquences possibles d’une telle démarche: évoluer au sein de l’entreprise dans laquelle on travaille, examiner l’intérêt d’une réorientation, se préparer à un changement de boulot et apprendre à mieux se vendre sur le marché su travail, vérifier si c’est une bonne idée de s’installer comme indépendant ou tout simplement s’assurer qu’on ne passe pas à côté de sa vie en poursuivant dans la voie entamée.

Un bilan professionnel, pour qui?

 Des consultants en réévaluation du projet professionnel déclarent recevoir presque toujours des personnes extrêmement qualifiées. Vu de l’extérieur, elles mènent une belle carrière, mais la plupart du temps, elles ont l’impression d’avoir perdu le fil rouge de leur vie professionnelle et veulent rectifier le tir. Un cas typique? Les ingénieurs civils qui se retrouvent à 40 ans dans des fonction de «people management», alors que ce qu’ils aiment, c’est le côté scientifique de leur métier. Trop d’entreprises, en effet, continuent à bombarder leurs meilleurs experts dans des fonctions de managers avec l’espoir de les garder au sein de l’entreprise. Mais dans cette nouvelle fonction, leur expertise n’est plus garantie. En outre, s’ils ne possèdent pas le potentiel pour bien gérer leur équipe, ils risquent de faire fuir d’autres experts… D’autres fois, c’est l’environnement de travail qui coince: les salaire offerts par la Commission européenne, par exemple n’empêchent pas certains fonctionnaires de se sentir brimés, victimes d’une structure très normative.

En France, où le bilan de compétences est un droit pour les salariés,

  • 91% des cadres bénéficiaires déclarent avoir amélioré la perception de leurs propres compétences,
  • 82% avoir acquis une plus grande confiance en eux-mêmes
  • 80% avoir vérifié des choix et orientations professionnelles.

Comprendre la cause et le sens de ses réussites et des ses échecs, procéder à un inventaire exhaustif de ses compétences, redécouvrir ses motivations réelles, c’est prendre conscience des facteurs qui conditionnent l’adaptation et la réussite professionnelle.

Et nul besoin, pour tirer profit d’une telle réflexion sur sa carrière et sur soi-même, de changer de boulot. Beaucoup vont continuer à faire le même boulot dans la même entreprise. Mais ils vont modifier certains aspects de leur manière de travailler, préparer leur évolution en développant de nouvelles compétences, ou encore se repositionner vis-à-vis de leur job, en décidant d’arrêter de s’irriter de ce qui ne va pas et de se concentrer sur ce qui va bien. Avoir défini son projet professionnel, cela motive, mais cela permet aussi d’économiser son énergie et de la canaliser vers les occasions les plus intéressantes pour enrichir son expérience.

Un certain nombre d’entreprises offrent ce service à leurs cadres et parfois, à leurs employés. Schématiquement, deux grandes sociétés sur trois vont envoyer leurs jeunes cadres, après trois ou quatre ans, pour une recherche de potentiel. Et environ trois seniors sur cinq auront l’opportunité, au moins une fois dans leur vie, de faire cette démarche. C’est très important parce que les gens ont souvent des «blind spots» (ndlr – des trous noirs) sur leurs propres compétences et leur propre futur: ils possèdent des capacités qu’ils ignorent, ils croient avoir des capacités qu’ils n’ont pas, ce qui est un obstacle à leur développement… Si vous pensez avoir du potentiel et que votre entreprise le néglige, il est utile de prendre les choses en main et d’entamer vous-même ce type de démarche.

Comment ça se passe?

Au fil d’une série de rencontres et d’entretiens, éventuellement accompagnés de tests -mais beaucoup de professionnels du secteur se montrent prudents vis-à-vis de cette technique – le salarié va décortiquer son parcours et faire un travail personnel pour mettre à jour ses compétences, ses aptitudes, ses aspirations.

Il existe, bien entendu, de multiples méthodes dans ce domaine, mais elles comprennent généralement trois grandes phases: le bilan proprement dit, l’exploration puis la vérification. Plus qu’un simple bilan, il s’agit de faire le point sur ce que la personne a fait, sur ce qu’elle est, et d’en dégager une vision prospective. L’objectif: développer des projets professionnels et des clés pour les réaliser, avec un plan d’action accompagné d’outils de communication corrects, par exemple un C.V.

Le processus plonge assez loin dans les détails, obligeant à un retour en arrière sur les différentes étapes du passé professionnel. Il faut par exemple retourner jusqu’au temps où la personne a été chef scout, pour mettre à jour ses capacités d’organisation. Il faut l’aider à démarrer le processus, conforter son opinion sur ses compétences. Pour chaque étape de sa carrière, il lui faudra réfléchir à sa fonction, à ses tâches et responsabilités, aux réalisations et aux incidents, aux connaissances et aux compétences qui ont été mises en œuvre… Souvent, il est également demandé de confronter la perception que l’on a de soi-même à celle de son entourage. Une fois toutes ces informations rassemblées, il sera possible d’analyser les atouts de la personne. Puis on passera à la définition de projets, étape plus difficile.»

Un bon moyen pour se faire? Se forcer à formuler quelques fantasmes, même si la chance de les réaliser est quasi nulle, comme rêver de devenir chanteuse d’opéra alors qu’on est persuadé de chanter faux. Se projeter dans un autre univers permet d’esquisser les contours d’une vie idéale, dont certains éléments sont peut-être inaccessibles. Il faut travailler d’abord sur le projet hors contraintes, faute de quoi la personne se focalise sur elles. Ensuite, examiner l’essence du projet, en réintégrant progressivement ces contraintes, mais à leur juste place.

Mais parfois, c’est le phénomène inverse qui se produit: il faut ramener la personne sur terre. Par exemple, le cas d’un jeune diplômé qui rêvait de devenir responsable des ressources humaines. Mais il n’avait jamais recruté, jamais évalué, jamais procédé à des classifications de fonctions. Il avait juste un peu négocié avec les syndicats et s’y connaissait en droit social. De là à convaincre une entreprise de l’engager comme responsable des ressources humaines…

Déterminer le type de travail que l’on souhaiterait faire (diriger, organiser, contrôler, travailler avec des gens ou autour d’un produit…) et dans quel contexte (une grande boîte, une PME, le non-marchand…) ne suffit pas. Il faut encore confronter ses aspirations à la réalité, et investiguer sur les possibilités existantes. A 35 ans, on ne trouve plus un boulot par petite annonce. Si on veut travailler dans l’environnement, mieux vaut savoir ce que sont Greenpeace ou le WWF, et idéalement, rencontrer des gens dans ce domaine. Il faut également apprendre à utiliser ses compétences proches: souvent, ceux qui travaillent dans des groupes de plusieurs milliers de personnes sans savoir si en interne, il n’y a pas des choses qui pourraient leur convenir. On va également souvent travailler sur la notion d’itinéraire, et mettre à profit les différents jobs comme moyen de formation.

Evitez les confusions

Lorsque c’est l’entreprise qui envoie son salarié chez un consultant, la tâche est bien entendu mieux circonscrite. Dans ce cas, on part d’un profil de compétences rédigé avec l’organisation, qui définit les compétences, les capacités techniques ou les attitudes nécessaires à un niveau donné. Puis on mène des exercices d’assessment où l’on met la personne en situation, combinés à une interview approfondie et parfois, un test de personnalité.

Quelle est la différence par rapport au coaching? En coaching, la personne va davantage parler de son entreprise, de ce sur quoi elle travaille, elle va partager ses difficultés pour trouver des techniques qui l’aident à lever rapidement les obstacles. Ici, il s’agit plutôt de développer de nouveaux comportements avec des objectifs très précis, par exemple comment se comporter en bon leader ou encore comment gérer son stress.

Le bilan de carrière, s’il emprunte certaines des méthodes de la psychologie – les techniques d’entretien en particulier – n’est pas non plus une psychothérapie: l’accent est mis davantage sur la vie professionnelle et sociale, très peu sur la vie privée.

Qui offre ce type de services?

Schématiquement, ce secteur d’activité est scindé en trois parties. A une extrémité, les grandes sociétés commerciales (cabinets de recrutement, de recherche et de sélection ou d’outplacement) quasi exclusivement tournées vers la clientèle d’entreprise. A l’autre extrémité, les services publics comme le pôle empli, qui s’adresse avant tout aux demandeurs d’emploi. Et entre les deux, une nébuleuse de consultants indépendants ou de psychologues, avec quelques rares organisations clairement spécialisées dans le domaine.

Les frontières sont toutefois mouvantes, et le paysage se modifie. Plusieurs grosses sociétés, jusqu’ici focalisées sur leur clientèle d’entreprises, commencent à prendre en compte la demande de particuliers, mais plutôt discrètement et le plus souvent, moyennant une politique tarifaire sélective – financièrement, il est plus intéressant de travailler pour de gros clients que pour des individus. Il y a un grand nombre d’indépendants qui se disent spécialisés dans le secteur: des psychologues, mais aussi des gourous ou des cartomanciennes… Du côté des structures plus importantes, beaucoup de bureaux de consultance actifs dans la gestion des ressources humaines, qui proposent de l’assessment, réalisent aussi des bilans de compétence pour les particuliers. Nous le faisons nous-mêmes, mais surtout pour des profils très élevés. Des firmes d’intérim se lancent aussi dans la partie.

Côté pouvoirs publics, Pôle emploi offre du conseil en orientation professionnelle, mais avec priorité aux demandeurs d’emploi.

A côté des organisations, travaillent une série de consultants individuels, mais tous ne sont pas réellement spécialisés dans le bilan de carrière. Faites marcher le bouche-à-oreille.

Combien de temps et d’argent cela nécessite-t-il?

 Durée et prix varient selon le conseiller choisi et les souhaits de l’intéressé. En moyenne, on navigue entre quatre et 20 rencontres, pour une démarche qui s’échelonne sur un mois et demi à six mois.

Un spécialiste en outplacement travaille pour un tarif horaire de 75 euros hors TVA si l’on opte pour un programme à la carte – pour un bilan de carrière complet, qui comprendra 10 à 15 séances de deux heures chacune, il demande 1.800 à 1.900 euros, toujours hors TVA. Le processus sera bien entendu plus léger pour quelqu’un qui entreprend un bilan après trois ans de carrière que pour un cadre expérimenté.

Du coté des grandes sociétés privées, les prix peuvent monter plus haut encore. Comptez entre 1.000 et 1.600 euros pour un jeune cadre, et 1.500 à 3.000 euros pour une personne plus expérimentée.

Le conseil le plus utile reste sans doute de comparer et de se renseigner, en frappant à plusieurs portes avant de se décider. Ne vous précipitez pas sur la première adresse venue. N’hésitez pas à contacter différents organismes. Vérifiez leur approche, la nature de leurs résultats, et assurez-vous qu’il y a adéquation avec vos attentes et votre personnalité.

 

 

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